mercredi 27 mai 2009

MARILYN MANSON : The High End Of Low


MARILYN MANSON : The High End Of Low


Un album qui tient difficilement sur la longueur. Cependant quelques pépites noires se nourrissent des morceaux rebus pour mieux exister. La voix de Manson fait une nouvelle fois des dégâts, et se meut dans d’improbables excroissances. Musicalement, le fan est en terre connue ; le critique davantage en terre maudite. Difficile de poser un regard neuf sur un personnage que l’on croît connaître depuis des décennies. Se jouant du qu'en dira t’on, Manson avance, conquérant. Quitte à passer en force. Les ambitions sont grandes, parfois pompeuses (I want to kill you…).

Comme sur l’autel, il y a à boire et à manger sur cette nouvelle hostie putride. « Au commencement était la parole », Devour sonne comme une complainte à donner la chair de poule. Manson, implorant, donne le vertige. Un titre sans artifice, presque épuré. La montée en puissance de l’émotion est palpable, jusqu’au final qui allie la force destructrice d’un Antichrist Superstar forniquant sur les orageuses mélodies de Eat Me Drink Me. Le doublé gagnant d’entrée est une totale réussite, Pretty as a swastika passe la cinquième sans crier gare. Du Manson pur jus, saturé comme à la belle époque (Antichrist et mieux : Portrait Of An American Family) Le refrain est saccadé, hurlé. Très court (2mn45s), mais intense, le titre n’est pas forcément révolutionnaire, mais diable qu’il est bon de se refaire botter les fesses de la sorte.

Autre objet de fascination : Four Rusted Horses sonne comme du Johnny Cash sous acide. Un délice au casque, le mix est enivrant. C’est le cœur serré, que l’on sort épuisé de ce titre monstrueux. Une phrase résonne alors comme une fausse promesse : « everyone will come to my funeral to make sure that i stay dead ». C’est là que le bas blesse.
Car qui a peur aujourd’hui de Marilyn Manson ? Il n’est plus l’homme à abattre, encore moins la terreur d’une Amérique puritaine. Ce faux délire de persécution n’a plus droit de citer. L’homme avait pris le pas sur le révérend, Brian Warner avait bel et bien enfermé dans la douleur son double maléfique sur Eat Me Drink Me.
De même, les bondieuseries ne peuvent plus être fond de commerce et s’est presque une insulte que de proposer un We’re From America à ce stade d’une carrière aussi incroyable. Et pourtant, ce single probable reste ultra efficace. Ultra balisé, ultra pop, le titre semble taillé pour le live façon bourrage de crâne. Les paroles n’arrachent pas trois pages à une Bible qui commence sérieusement à sentir le réchauffé. Mais « God is an excuse ». Effectivement.


Roublard le Manson, nous ressert avec Arma-goddamn-motherfuckin-geddon le single cradingue qui rameute la foule. Définitivement passé maître dans l’art de tromper son monde, l’homme propose un titre aux accents glams presque anecdotique, comparé aux pièces maîtresses de l’album.
Car du potentiel, l’album en regorge. Impossible de le nier. The High End Of Low en a sous le pied, les trésors les plus courus sont souvent les plus difficiles à dénicher. C’est par exemple au détour d’un refrain effroyable que l’easy listening Running To The End Of The World se révèle. Ce qui au premier abord semble n’être qu’une ballade d’un autre temps prend alors la tournure d’un coupe gorge désabusé.

Brillamment marketté comme l’album du retour au gros son, The High End Of Low est tout sauf cela et reste avant tout une continuité dans l’exploration des émotions d’un artiste fascinant. Inégal et parfois bancal (Wight Spider, Unkillable monster et autre incongru WOW), le Marilyn Manson nouveau impressionne néanmoins. Et secrètement, personne n’osait en douter !

Noesis.

jeudi 7 mai 2009

INTERVIEW DEATHSTARS.



« Pour plus d’infos, nous devrions coucher ensemble… »

Soirée Halloween en compagnie de Whip. Le chanteur de Deathstars, si impudent sur scène nous confie sa timidité dans la vie de tous les jours, mais ne rate pas une occasion de nous inviter à le rejoindre au lit…
Epuisé mais heureux après une longue période d’enregistrement sans heurts, il confirme que Night Electric Night (originellement connu sous le titre Death Glam) sera encore plus sexy que Termination Bliss. « Même vos parents se désaperont à l’écoute du nouvel album » Explorant davantage les côtés pop de leur musique, les musiciens s’enthousiasment de cette nouvelle dynamique, sans renier pour autant les faces les plus sombres et glamours de leur univers. Whip évoque alors Blood Stain Blondes et Opium, deux titres à l’énergie pop communicative qui rallieront à la cause Deathstars n’importe quel réfractaire.
Plus libre que jamais, le groupe salue néanmoins l’héritage de la scène metal extrême : « Le black et le death metal sont le centre de notre ossature. »

« It’s all about Kiss. »
Whip aime comparer Deathstars à un « mini Kiss ». Leur image n’est qu’une extension presque naturelle de leur musique. Sur scène, Whip se sent chez lui, en sécurité. Ailleurs, il vit dans la peur d’un monde dirigé par John Mc Cain. Il apporte donc son soutien à Obama, même s’il vomit sur les States et leur propension à tout détruire.

« Death magnetic est un très bon album… »
Surfant sur la vague de la polémique, Whip nous assure que tout le cirque organisé autour du plagiat présumé de Metallica n’était qu’une grosse plaisanterie. Ironique, il ajoute que Metallica n’a même probablement jamais entendu parlé de Deathstars !

Finalement, Whip nous avoue n’attendre qu’une seule chose: le retour de Deathstars sur scène, en tête d’affiche, cet été ! Il revient volontiers sur la tournée commune avec Korn, un gros challenge selon lui. Jouer devant la génération Néo, ce n’était pas gagné, mais il semble avoir apprécié l’expérience.

« J’ai toujours cette folle envie de jouer à Tchernobyl… »
Le réacteur Deathstars est en fusion. Nul doute que son nouvel attentat nucléaire marquera le début de l’année 2009 d’une empreinte glam et sexy.


Noesis.

Abd Al Malik, Lille, Sébastopol, Mars 2009.



Abd Al Malik, c’est avant tout l’histoire d’un malentendu. Il n’est pas que la bête de foire intello et télégénique que les médias veulent nous imposer, le modèle de réussite issu des quartiers. Il est avant tout une bête de scène qui déborde d’envie. « Un truc de malade ! »…

Sébastopol affiche presque complet lorsque Taïro monte sur scène. Le temps de quelques titres, ce nouveau talent Warner arrive à convaincre le public. Sa soul teintée de reggae touche le public en plein cœur. Je ne t’aime plus embarque Lille dans un univers propice au cocooning. Chaude et suave, la voix de Taïro administre une sacrée dose de cool attitude. L’artiste fait même déjà preuve d’audace en imbriquant l’inattaquable No Woman No Cry dans son L’animal Geint. Deux pépites sortent du lot ce soir : Jamais Eu et Dis Moi Ce Que Tu Décides qui feront perler les bonnes vibes jusqu’en fond de salle. Une réelle surprise.

Abd Al Malik a méchamment mis à mal les préjugés. Le plus tenace restait celui du Black érudit qui se la raconte. Sur scène, là où on ne le voit pas assez souvent à la télévision, il en impose. Qu’importe si l’homme est un orateur hors pair assis face caméra. Debout face au public, il est à nu et va chercher même les plus sceptiques.
L’introduction sur Soldat De Plomb en a mis plus d’un à terre. Tout en ombre démultipliée, le Roi (Malik) fait déjà son show. Emmitouflé sous sa capuche, il marche au pas et donne le rythme à une soirée qui promet d’être dansante et réfléchie. Sur les planches, la force brute d’une formation live à l’efficacité redoutable : accordéon, contrebasse, batterie, guitare, machines, piano et claviers. Bien loin du tape à l’œil, le rappeur fait sonner son phrasé Nougaro avec une plume parfois empruntée à Brel. L’émotion est souvent à fleur de peau : Conte Alsacien et C’est du lourd en tête de liste. Une force live telle que ce dernier titre se verra offrir les honneurs d’une standing ovation de tous les diables !
Moins pertinente sera la version sous acide de 12 Septembre 2001. Peut être la seule fausse note d’un concert enlevé.
Roublard, Abd Al Malik maîtrise sa scène d’expression. Il sait enflammer une foule et la remercier pour cet échange sincère. Gibraltar reste le point d’orgue de cette communion, un classique de la chanson française, rien que cela. Sur un beat affolant, Malik fait durer le plaisir et étire le titre jusqu’à plus soif. En liesse, Sébastopol acquiesce. L’alchimiste déclame alors un dernier conte merveilleux empli de positivisme et s’en va.
« Je suis votre humble serviteur. Je m’appelle Abd Al Malik. »



Noesis.

ACWL : une vie plus tard.



Petite critique flash back du deuxième album de ACWL.
Méchamment passé au crible d’une foule extatique d’Indo fans lors de l’épilogue du Paradize Tour 2003, le groupe sortait en 2005, une pépite de rock façon new wave.
Aussi à l’aise dans l’électro –Délivrez moi- que dans de plus sombres affects –Les amants du paradis-, Céline, chanteuse habitée, porte une musique troublante, un univers bancal d’amours déglingués.
Solisphère, monument spectral qui aurait eu sa place en ouverture hante l’auditeur des heures durant. Une voix contemplative malmenée par des saturations déchirantes.
Des fissures que l’on retrouve dans le duo enregistré avec Nicola Sirkis –Indochine-.
Quand viendra l’heure, sépulture moribonde qui craquelle les cœurs en une deuxième partie métallique, toutes guitares dehors.
Romantisme exacerbé, on pense parfois à The cure ou à Joy Division sur ces onze titres. Onze signes de l’excès et de la démesure. Un chiffre à part, sacré.
Les années passées, le monde de ACWL reste angoissant et tragique. Définitivement dans son temps.

Noesis.

AEROSMITH. PARIS BERCY. Le 19/06/07.



Aerosmith. One Night in Paris. The place to be.
Bercy la Belle affiche complet en cette chaude soirée de Juin. Des années que les fans attendent le retour du gang Tyler en France. L’introduction sur écran géant donne le ton. Le logo se pose lentement sur la planète bleue. La leçon de géographie passée, Love in a Elevator fait lever les mauvais élèves. Le son est impeccable pour le bunker parisien. Steven prend déjà les poses les plus improbables. Incroyable comme le temps ne semble pas avoir d’emprise sur lui. Joe Perry, le visage davantage marqué par les années de route fait le show. La fosse est en ébullition. La mise en bouche est délectable. Le chanteur au charisme animal se déhanche sur l’avancée de la scène. Chapeau vissé sur la tête, dégaine d’un autre âge, la classe faîte homme harangue la foule.
Les titres s’enchaînent, des extraits de clips sont diffusés pour accompagner le groupe.
Monté en direct avec les images live, le spectacle est également visuel. Le public ne sait plus où donner de l’œil. Une inscription sur le bas ventre du leader attire néanmoins l’attention : lèche moi. La gente féminine apprécie. Le rot introductif de Miss a Thing n’altère même pas son sex appeal. Filmé en plans serrés, cheveux au vent-ilateur-, Steven a de quoi mettre sur les fesses.
Baby please don’t go assomme encore davantage l’audience. Contre plongé sur Tyler, des couleurs chaudes savamment travaillées… Il en prend alors des allures quasi-christiques. La messe est dite. Le temple Aero, citadelle imprenable, reste un lieu de culte incontestable. Dream On met Bercy en suspend. L’instant touche au divin, une douce sensation de plénitude emplit la salle.
La Gibson double manche est de sortie pour Living on the Edge, Perry assure également le chant sur Stop Missing Around, introduite par un road-movie du guitariste touriste en capitale française. Le duo-star éclipse presque les autres membres. Steven prend l’harmonica, back to the oldies ! Le numéro est bien rodé, parfois un peu trop. Mais le pardon est bien vite accordé devant tant d’abnégation. Le groupe se donne sans retenue, Sweet Emotion laisse la part belle au public. La communion est totale. Pain béni pour les fidèles, le rappel sur Walk This Way ravive la flamme. Dernière croisade ?
Non. Les lumières se rallument, mais le groupe revient pour en découdre à nouveau. Mama Kin est jeté en pâture aux dévots avides. Un cadeau rare pour un concert d’une rare intensité. « Oh Yeah ! »

Noesis.

Air, Aéronef, Lille, Le 17 Novembre 2007.



L’Aéronef retrouve l’affluence des grands jours. La mezzanine est ouverte à un public majoritairement adulte. L’accueil réservé à Au Revoir Simone est des plus timides. Avec pareil intitulé, le public s’attendait peut être à découvrir un groupe de chansons françaises…Les trois américaines viennent défendre leur nouvel opus : The Bird Of Music. Un son électro à la sauce pop sixties. Les demoiselles, studieuses, offrent peu, afférées au cœur de leurs machines. Un show propre et sobre qui ne se permet aucune liberté. Mais étonnamment, les compositions restent en tête. Des ambiances nostalgiques, un son quelque peu désuet font tout le charme de cet intriguant trio.
Air arrive en territoire conquis. Le public est définitivement plus réceptif et attentif que lors d’un Main Square Festival (Arras) de triste mémoire. Nicolas et Jean-Benoît, toujours aussi classes, déroulent un électro lent, presque envoûtant. A la limite du psychédélique parfois. La salle semble absorbée, comme en communion avec la musique. Davantage reçu comme une invitation à faire corps avec le calme apaisant de la musique ; le concert est planant, sans esbroufe visuelle ou sonore. La voix est murmurée. Quelques soucis techniques, bien vite oubliés lorsque résonnent les premières notes de Cherry Blossom Girl, perturbent les premiers instants célestes. People In The City plonge l’auditoire dans une torpeur mesurée. Chaque son est digéré, chaque mot est une douceur susurrée à l’oreille.
Quelques étoiles s’allument en fond de scène. L’expérience hallucinante est totale. Kelly watch the stars avec le public. Les yeux grands ouverts, les aficionados plongent dans une bataille spatiale gracieuse. Des envolées de claviers à faire pâlir Matthew Bellamy baignent dans une lumière rouge du plus bel effet.
Sexy Boy, passage obligé, en rappel, propose un nouveau voyage. Encore plus fantasmagorique, cette fin de set prolonge le plaisir. Lentement, l’Aéronef retrouvera l’atmosphère terrestre, avant de fermer ses portes.

Noesis.

APOCALYPTICA : Aeronef, Lille. Le 28 Novembre 2007.



Projet casse gueule. Apocalyptica prouve, une nouvelle fois, que le mélange entre le metal et le noble instrument n’est pas glacial. Et pourtant, des sceptiques, il y en avait, ce soir. Ceux qui n’attendaient que les reprises de Metallica, ou les quadras qui découvrirent la formation en tournée avec Rammstein. Tous, tous furent conquis par un set d’une précision chirurgicale.
En première partie, Lacrimas Profundere peine à convaincre. Poseur à souhait, le front man Rob semble fort peu concerné. Parfois même agacé de devoir prolonger son supplice en attendant la tête d’affiche. Aussi coquet que HIM, ses mimiques font néanmoins fondre la gente féminine. Etonnament, leur musique s’apprécie davantage sur albums. (Le très bon Ave End) Dommage que l’énergie déployée en studio ne se retrouve pas sur scène.

Une lumière blafarde inonde la salle. Quatre crânes, quatre trônes troublent le public.
Worlds Collide donne les premiers frissons. L’entrée est théâtrale. Les musiciens prennent place, après un salut. Un souffle majestueux emporte déjà l’Aéronef, vers des cieux agités. Intimidant, le groupe embarque le spectateur au cœur d’une douce sauvagerie. Les cordes apaisent ou transpercent, tour à tour. La batterie martèle et somme les premiers rangs de reculer, face aux assauts. I’m not Jesus (Corey Taylor de Slipknot, en moins) lance alors Eicca. Nul doute, pourtant qu’Apocalyptica ne soit l’idole attendue du metal classique. Le headbanging autour des violoncelles leur confère des statures magistrales.

Les membres se défient du regard. Le combat fait rage sur les planches et en contrebas. Incroyable comme le public se laisse aller à la communion. Les slams savent se faire cotonneux sur Helden. Bercés par une marée humaine caressante, les corps se meuvent dans les airs avec élégance. Till (Rammstein) manque inévitablement au titre. Mais l’émotion est intacte. On jurerait retrouver les souffles et les pleurs de l’allemand. Intense !

La première reprise de Metallica (Seek and Destroy) conserve la toute puissance des Four Horsemen. Scandé par les metalleux de tous horizons, le refrain marque les esprits. Les poings levés retombent bien vite alors que résonne l’introduction de Bittersweet. L’auditoire plonge dans une torpeur maladive. Les visages s’inclinent et les briquets s’allument.
Last Hope met un peu plus à genoux. La vitesse d’exécution effraie presque. Véritables objets de fascination, les violoncelles sont portés à bout de bras. La chaleur des cordes et du bois se fait plus pressante sur Hall Of The Moutain King. Le spectre de Fritz Lang est dans tous les esprits…Le sifflement de M angoisse. Les musiciens semblent maudits, eux aussi. Leur pouvoir d’attraction n’est plus humain.
Enter Sandman n’endort pas les aficionados. L’expérience live est unique. De même Life Burns soulève une dernière fois la foule, avant un rappel touchant sur Seeman. Les virtuoses se saluent et tirent la révérence avant de se retirer. Rideau !

Noesis.

AQME : HERESIE.



« Thomas, tu me dois un nouvel équipement hi-fi. »
Pour celles et ceux qui veulent tenter l’expérience sonore et braver l’énergie démesurée de cette Hérésie, fusillez les voisins en préambule. Ils ne vous pardonneraient jamais pareilles secousses sismiques !

Au-delà des coups de butoir, l’album marque également par de brillantes mélodies (Karma et Nicotine, premier single). Tour à tour affable et nihiliste, Aqme surprend une nouvelle fois. Thomas se fait vulnérable (Romance Mathématique) et impose son chant comme l’un des plus brûlants de la scène metal française.
Sur Casser / Détruire, joyau hardcore agité, le groupe flirte avec l’extrême. Les paroles pèchent toujours par une simplicité apparente, mais la sincérité transparaît encore. Une authenticité vorace qui s’immisce en l’auditeur, y dessinant une plaie béante. Le manque se fait vite sentir et l’on y retourne avec envie.

« Jamais Aqme n’aura sonné aussi proche d’Aqme. » (Thomas)

Noesis.

AQME. LILLE. Le Splendid. Le 08/12/06.



« « Foutez vous de nos gueules, c’est le moment où jamais ! » lance Thomas, sur scène, grimé en Elvis. Pourtant, il n’y a pas trop matière à critiquer le spectacle auquel nous convie un AQME revisité façon carnaval. Dernière date de la tournée, après trois ans de campagne sur les routes, ce concert explosif est placé sous le signe de la fête et du partage. Le Splendid de Lille est en liesse alors que résonne le thème de Rocky, annonciateur d’un set musclé.

Le pari est réussi. Le groupe touche un public de plus en plus large. Des fans de Slayer se sont mêmes invités dans une salle comble. Sur scène, AQME en impose. Malgré les costumes (Charlotte en lapin coquin…), l’énergie est de mise.
Mes vieilles réserves sur la qualité des textes et l’interprétation Live s’évaporent dès lors que la sincérité des membres transpire comme une évidence. Le son cristallin est assuré par les mains expertes d’une dame de joie, les lights par un adorateur SM. Toute l’équipe est travestie pour cette date exceptionnelle. Amour et franche camaraderie sont palpables. Ne cherche plus Cali. On l’a trouvé, le bonheur !

Ah, que mes oreilles prirent plaisir à redécouvrir des standards matraqués en radio, ici interprétés dans des versions brutes, beaucoup plus tranchantes. Superstar est reprise, scandée, par le public porté par les déhanchements sexy de Elvis. Parano et Pornographie font davantage monter la température. Etienne martèle ses fûts, Benjamin, à la guitare, nargue les premiers rangs sous sa casquette façon Village People.
Nul besoin de « regarder au loin pour avancer », la foule porte le groupe. Bel échange. Thomas Presley, bouffi de générosité, finira le set au plus proche des troupes, en bout de fosse. Un cul d’Etienne et un sex toy de Charlotte plus tard –pas l’un dans l’autre-, il est temps de tirer la révérence et d’applaudir à tout va pareille performance. Noesis, tu reviendras.
« « Foutez vous de nos gueules, c’est le moment où jamais ! ». Promis, j’essaierai la prochaine fois.

Noesis.

ARNO. AERONEF. Le 16 Mai 2007.



L’impression de retrouver un vieil ami autour d’une bonne bière. Refaire le monde, captivé par sa voix éraillée et sa gestuelle furieuse. Arno en concert, c’est les odeurs de bars enfumés et les arômes d’Ostende.
Ce soir, l’Aeronef affiche complet. Le jus de Box tour est de ces spectacles enchanteurs qui vous bringuebalent d’une émotion à l’autre sans crier gare. A fleur de peau, le public connaît le bonhomme, et se laissent embarqué dans son univers si particulier. Grimaçant, gesticulant tel un pantin, le bougre soulève les foules. Les anecdotes d’entre morceaux font mouche. Sarkozy, Hallyday, Mireille Mathieu deviennent les protagonistes involontaires d’histoires incongrues. Sur scène, les musiciens en imposent. Les jeux de lumières minimalistes renforcent la proximité avec le public.
Comme un bon vieux film 16mm qui se débobine, le concert est hors du temps. En aucun cas daté. Les titres du dernier album se fondent, sans faux raccords, avec les plus anciens. Plan séquence sur le chanteur dans les yeux de sa mère. Le souffle coupé, la salle murmure. Instants délicieux. Frissons. Reviens Marie soulève la même émotion. Tout en douceur, Arno chante la rupture comme personne. Négligé, cheveux hirsutes, sur sa chaise, il nous comte avec calme les affres de la vie. La toile encroûtée d’un cinéma de quartier, les effluves d’arrière bar. Tous les sens sont en alerte.
Changement de bobine, With you et ses relans électro plonge l’Aeronef dans un dance floor sous acide. Le chanteur possédé ensorcelle le parterre. Les basses frappent au cœur. Le remaniement du célèbre Oh la la la participe aussi à cet état d’apesanteur. Un véritable trip vers des contrées hallucinatoires.
Deux rappels ne suffiront pas à un public survolté, et encore, et encore, z'auraient pu danser la java… Les filles du bord de mer s’annoncent comme le générique de fin, la dernière pellicule d’un métrage maîtrisé de bout en bout.
La palme d’or du cœur, est, cette année attribuée à Arno pour son Jus de Box Tour.
Applaudissements.

Noesis.

Babyshambles et The Tellers, Aeronef, 13 Janvier 2008



C’est une salle pleine à craquer qui reçoit The Tellers par des applaudissements nourris. Le groupe belge a un peu de mal à réaliser l’accueil chaleureux du public. Leur musique entraînante, leur présence scénique trancheront radicalement avec une tête d’affiche à la ramasse.
Fuck Forever ! Peter Doherty est une sacrée salope. Attendu comme le messie de la dépravation, il n’est ce soir que l’ombre d’une vieille punk star avinée. Une heure de set bien tassée et s’en va. Rarement communion avec le public n’a été si peu survolée. Le regard vide, parfois titubant, difficile de pardonner pareille insulte à l’Aéronef. Les fans auront sans nul doute adoré cette non présence, ce je m’en foutisme permanent. Les plus modérés, eux, n’hésiteront pas à huer alors que les lumières se rallument à 21h15, pour une fin de live annoncée à 21h45.

« - Service après vente des compositions, bonjour. »

Pas grand-chose à retenir de ce simulacre de concert. Peut être, un Delivery ultra efficace qui rebombe le torse, après un Carry On en demie teinte. Les titres s’enchaînent à une vitesse vertigineuse, presque morts nés. Quatre ou cinq morceaux initialement prévus seront oubliés en fin de set. Le respect du public, on connaît ça dans la bande à Doherty. Vingt six euros tout de même pour approcher la légende, sans parler des prix qui enflammaient E-Bay. Le public est loin d’en avoir pour son argent, et il repassera pour le frisson. Heureusement, le spectacle était dans la salle : un couple qui se fout sur la gueule pour une histoire de fesses, des jeunes rebelles qui bravent l’interdiction de fumer, des slams d’une belle brutalité, etc.
Mais pour faire aussi court que Peter, on ne s’étendra pas davantage. De toutes façons, « It’s only rock’n roll » …

Noesis.

Bartone Les Enracinés.



Le sens de la mélodie imparable. Les enracinés mettent à genoux. Bartone signe là un brûlot rock abrasif. S’aventurer aux creux de ces douze chapitres, c’est un peu comme allumer sa première cigarette. La dépendance sournoise s’immisce dans nos vies. Une voix venimeuse s’inocule en veines, lentement. L’envie dangereuse d’y revenir. Première bouffée, dernier espoir de s’en sortir. Le refrain de A Genoux allume la flamme. Ma Chère Ex, le single à paraître, attise d’autres plaisirs planants.
Une histoire d’amour tiède qui brûle de plus en plus. Incroyablement dansant, le titre fait des merveilles. Le temps de reprendre ses esprits, d’en griller une autre et de s’inscrire au Fan Club qu’on ne réalise pas ce qui se trame au-dedans. Bartone, chaînon rock manquant entre Da Silva et Mickey 3D roule vers un succès programmé.
« Faut-il vraiment que je développe ? » Inutile, Bartone. Tu ne mourras pas prématurément.

Noesis.

BAT FOR LASHES : fur and gold



« Viens, ô illustre auditeur, grande gloire de LilleLaNuit. Arrête ta nef, afin d'écouter notre voix. Aucun homme n'a dépassé notre île sur sa nef noire sans écouter notre douce voix. Puis, il s'éloigne, plein de joie, sachant de nombreuses choses. » *

La grosse surprise du moment. L’échappatoire à une pop morose qui tourne en rond. Les quatre demoiselles de BAT FOR LASHES vous enchanteront, vous entraîneront dans une transe chamanique.
Björk en tremble déjà.
Sur le même modèle hallucinogène, votre voyage initiatique sera rythmé par une voix charmeuse. Impossible de ne pas succomber. Telle une belle sylphide, Natasha Kahn, la chanteuse, apaise les maux et hypnotise.
Ne tombez pas du radeau. Médusés, ne vous noyez pas en des eaux tumultueuses. Allez jusqu’au bout du périple. Tendez l’oreille au vibrant Horse and I et sa batterie entêtante, apprivoisez les inflexions d’une voix qui se pose tour à tour sur une harpe et sur des nappes électro. Trophy, touche presque au sacré, dans son ambiance indienne surnaturelle. Le rêve éveillé se prolonge sur onze titres, une isolation sensorielle presque dérangeante.
Enchanteur cet album ?


* Libre adaptation. Homère - Odyssée, XII (v.142-200)

Noesis.

BAWDY FESTIVAL



Pinder, Zavatta et compagnie n’ont qu’à bien se tenir. Un autre cirque est dans la ville.
BAWDY FESTIVAL ne fait pas dans le même style que l’orchestre du cirque Gruss.
Et pas de Monsieur Loyal ici.
Les clowns de la troupe font peur et montent un chapiteau tendance Freak Shows à la sauce hardcore.
Orgue de barbarie, ambiance de foire ténébreuse, on sent presque l’odeur de barbe à papa.
Des sucreries cependant bien encroûtées. Atmosphère lourde dès l’entrée en matière. Des pleurs d’enfants couvrent la douce comptine d’une boîte à musique. Le voyage dans ce barnum de l’horreur peut commencer.
Les portes s’ouvrent dans un fracas effrayant, araignées et squelettes à l’odeur nauséabonde vous passent sous le nez. Brrrr.
La voix vous glace le sang, les enfants flottent peut être aussi dans cet enfer de sons déstructurés. Imprévisibles, comme un train fantôme, on ne sait jamais ce qui nous attend au détour de breaks audacieux.
Une révélation. « Ça » joue diablement bien et l’esthétique est au rendez-vous.
Ambiance aux petits oignons pour un groupe qui maîtrise tout de son univers grand guignolesque.
Bien plus fin et intelligent qu’un SLIPKNOT, plus audacieux qu’un MUSHROOMHEAD --pour les groupes à tendance masquée---, BAWDY FESTIVAL est bien parti pour déterrer votre grand-mère.
Une claque. Une vraie.
Un site internet à l’esprit complètement barré est consultable, pour les plus téméraires, à cette adresse :

Vivement recommandé !

Noesis.

BORIS : De Kreun, Courtrai. Le 03/07/07



Première excursion en la salle DE KREUN, à Courtrai, drôle de mix entre une Malterie et un Splendid Lillois. La proximité avec le groupe BORIS sera totale, peut être même trop… Pas de première partie, l’entrée se fait sur un bruit sourd. L’atmosphère est froide, lourde. Un immense gong trône au beau milieu de la scène. Un malaise palpable s’installe. Le chant se fait alors entendre et l’émotion cède bien vite la place à une syncope des sens. Le son est atroce, les basses détruisent les tympans. Les oreilles se bouchent de partout et les regards fusillent Madame l’ingé son. Dommage, car Farewell possédait quelques belles envolées. C’est les ailes coupées que BORIS entame Rainbow. La belle Wata, au chant est perturbée par de désagréables larsens. Toujours pas de répondant au niveau de la table de mix… Le solo de guitare déstructuré s’en voit lui aussi entaché. Sur un rythme lancinent, cette déflagration sonore est le début d’un nouveau chapitre. Un autre univers est exploré avec Pink, qui démarre sur des bases beaucoup plus metal. Le trio ne fait pas dans la demie mesure et se donne sans compter sur cette tournée européenne. Korosu est lancé dans la foulée. Aucun temps mort. Atsuo, à la batterie mène le morceau. Sa vitesse de jeu est impressionnante, et ses coups de gong vrombissent en chaque spectateur. Oublié les acouphènes et autre surdité passagère, le live emporte tout. Une power ballad trouvera même sa place en fin de set. Un instant de calme et plénitude magnifié par Takeshi et sa guitare basse double manche. Le concert se terminera par quelques trente minutes torturées de l’album FLOOD.
Un live conceptuel aux ramifications multiples qui éclipserait presque les prestations de DIR EN GREY et autres KAGEROU. C’est dire !

Noesis.

CALICO : Faire le jeu.



Il y a un petit côté désuet dans la voix de Calico qui en fait tout le charme. Troisième album, sans artifice, où l’Homme prend le temps de se poser là sur des rythmiques douces mais pas mielleuses. La musique sait se faire vivifiante : passé l’âge et son final enlevé lancent la partie. Le groupe a les cartes en main et sème le trouble chez les auditeurs, qui se mettent bien vite à table, devant un jeu si riche. La tempête gronde. Katel, nouvel atout majeur rejoint Jean Marie au chant pour une embardée expéditive. 1mn47s de gratte aux petits oignons. Foutaises prolonge le plaisir avec des harmonies délicates. Quoi dire… Les paris sont ouverts. Espérons que les cinq musiciens raflent la mise et que le public ne se couche pas. Calico relance le rock breton, et nous on est au tapis !

Noesis.

CHRISTOPHE MAE : Mon Paradis



Christophe Maé est sans doute la plus grosse blague de l'industrie musicale de ces dernières années.
Tout droit sorti d'une comédie musicale à succès d'un autre temps, le jeune homme est le nouveau Roi Soleil du Top 50.
Inconcevable.
Comment un tel phénomène peut-il encore tromper la France entière?
""Papaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaa"", voici la réponse.

N'ayons pas peur des mots. Son paradis, c'est avant tout notre enfer.
Christophe Maé est insupportable.
Une voix qu'on croirait extraite d'un vilain cartoon.
Des mélodies bateaux assurées par un canard qui n'est pas là pour révolutionner la marre, mais pour la vider de toute substance.
Des singles à la tracto pelle qu'on voudrait nous faire manger à toutes les sauces.
Partout, il est partout. Et évidemment, il agace. La promotion ne fait pas dans le discret.

Et puis, ce qu'il y a de marrant avec Christophe, c'est qu'il ne se repose pas sur ses acquis. Le petit gars bosse. Il sort des DVDs enregistrés à la plage, fait des clips au soleil où il a l'air triste et concerné.
Autre méchant forfait qui mériterait amputation des jambes: notre homme fait des petits bonds partout comme ses copains kangourous. Un partenariat entre l'artiste et les parcs d'attraction Walibi est à l'étude. Ne pas trop fixer l'animal sous peine d'un décollement de rétine fâcheux.

Christophe, c'est le Alfred J Quack du Top 50. Et rien que pour les bonnes poilades qu'il nous donne à son écoute, on peut lui dire "Coin Coin" (Merci).

Noesis.

Christophe Willem: Fermeture Pour Rénovation



Christophe Willem a depuis deux ans, un capital sympathie gros comme ça. Sa bonhomie et son enthousiasme torpillent n’importe quel plateau télé. L’étoile montante de la variété française brille partout. En un album et demie, La Tortue fait déjà le lièvre et parade bien malgré elle dans une tournée des Zénith.
Néanmoins, sur scène, l’artiste peinait à convaincre avec un concert parfois longuet, souvent bancal.
Rock’n France avait d’ailleurs dressé l’Inventaire de ce double jeu dérangeant.

Défendu par une horde de fans rageuse qui fustige le moindre écart critique, Christophe a déjà un magazine* lui étant entièrement consacré. Rarement pareil abattage médiatique ne s’est fourvoyé dans un consensus aussi rose bonbon. A croire que notre homme touche au divin, ou à l’hypnose.
Et pourtant…

Et pourtant, le double dvd et ses bonus nous réconcilient avec Christophe.
Les menus délirants nous plongent d’emblée dans une bonne humeur communicative
On y verrait presque ce qu'il y a sous la carapace de la tortue ! De même, le coup de fil avec MADONNA est réellement très drôle.
Par instants exaspérant en salle, le dvd recentre le bonhomme sur la performance, sans y aller à fond sur les apartés et reprises interminables. Le concert semble alors plus sobre et davantage cadré. En somme, un live agréable à suivre de bout en bout !

Le documentaire « Raconte moi le concert », intéressant et sincère, va chercher le spectateur. Christophe semble s'adresser directement aux fans, par de petits bandeaux de textes déroulants.
Les défauts relevés lors du live report deviennent alors les atouts de ce dvd. La douce folie du personnage fait mouche. Complètement à l'opposé des vidéos impersonnelles, ces deux disques semblent habités par l’esprit déjanté d’un grand gamin qui s'amuse.
Ce dernier va au gré de ses envies et semble profiter de son nouveau jouet. Christophe nous présente ses idées de mise en scène les plus improbables, notamment une entrée sur les planches ridicule mais tellement drôle. De même, il est agréable de voir que la mécanique du spectacle n'est pas figée (le fou rire sur Pourquoi tu t'en vas) et qu’il y a aussi la place pour de jolis instants d’émotion (les yeux brillants du chanteur quand Zazie le rejoint au Bataclan pour Jacques a dit.)

Très emballant, Fermeture pour Rénovation pourrait être élu produit de l’année, et sonne en tous cas comme une vraie redécouverte de l'artiste.


Noesis.

* Otaké ! Mag

Christophe Willem. Zenith Lille. Le 24 Février 2008.



Jacques a dit : « tire toi une balle dans le pied ».
L’étoile montante de la variété française peine à convaincre avec un concert ennuyeux et bancal de bout à bout. Inventaire, excellent album, ne trouve pas sur scène un écho satisfaisant. Le groovy Quelle chance en ouverture tombe à plat, malgré des fans « au taquet ». Sunny nous est une nouvelle fois proposé, mais le cœur ne palpite plus comme à Baltard. La nouvelle star a beau fendre la fosse sur Le lycée dans une atmosphère de franche camaraderie, quelque chose cloche. En totale roue libre, Christophe Willem se lance dans d’interminables discussions avec son public. Grisé par la foule, il en fait des tonnes, quitte à y perdre de sa superbe prestance. Elu produit de l’année ?

Incompréhensible. Comment Christophe Willem a-t-il pu céder aux affres de la tournée fourre tout ?
Malgré un son et un éclairage soignés, l’intimité ne prend pas. Un bien bel habillage pour un contenu qui joue la carte de l’esbroufe. Quelques titres seront servis par deux fois, revisités en acoustique. L’intérêt est limité. Roublard, Christophe se repose même sur ses facilités déconcertantes ! Sur Safe Text, l’ennui pointe, le chanteur n’allant jamais au bout des choses, survolant une émotion avant de l’ « envoyer valser ».
Le concert « ne tient plus qu’à un fil » : le capital sympathie du personnage. La Tortue, s’efface parfois devant Lauranne (choriste) et Skye (guitariste). Même si on peut saluer cette louable envie de partage (Sky chantera une de ses compositions), il s’agirait de ne pas se perdre.

Les reprises, incalculables, finissent de gonfler artificiellement un set qui s’éternise sur plus de deux heures. Mécanique mal huilée. Certains spectateurs, épuisés, jetteront l’éponge avant la fin. Un rendez-vous manqué pour un talent si grand.

Noesis.

CLOCK Le manifeste des hommes briques.



Dark City. Une fuite permanente. Sur des rythmes syncopés, Clock remet les pendules à l’heure de la contestation. Décret national : le manifeste des hommes briques est une œuvre dangereuse, subversive. Les bas fonds et leurs odeurs stupéfiantes enivrent. L’absinthe coule à flot à Griville.
Le chaland est happé dès les premiers tours de bobines. Album conçu en cinémascope noir et blanc, ce brûlot hantera vos nuits les plus agitées. Des murmures, des cris, un piano lancinant ... Bienvenue au cabaret d’enfer. Jour de comité : à l’étude, cinq malfrats qui pillent le cerveau des honnêtes gens. Leur post rock ténébreux angoisse. Sueur froide, impossible de ne pas succomber aux arrangements tortueux de ce club des cinq éventreurs.
Clock tourne les aiguilles dans la plaie. A cœur ouvert, l’auditeur sort de ce sombre voyage, épuisé. Fasciné.

Noesis.

COLDPLAY : Viva la vida.



Eugène Delacroix destitué de son œuvre pour une pochette de disque. Une autre dérive vers le grand fourre tout dans lequel se fourvoie de plus en plus Coldplay. La Liberté guidant le peuple donc. Et de liberté, il ne sera nullement question dans ce disque. Déjà enfermé dans la catégorie « petit frère de U2 », le groupe va chercher Brian Eno à la production et s’enferme dans un Joshua Tree du pauvre. Viva La Vida, le titre fait sourire, l’ouverture sur Life In Technicolor agace davantage. Totale refonte ou repompe de l’intro de Where The Streets Have No Name, l’esprit en moins, le morceau singe également les pires effets de reverb’ propres à 30 Seconds To Mars. Cela fait déjà beaucoup.
La liberté pour Coldplay, ce n’est manifestement pas pour aujourd’hui. On se plaît à imaginer un groupe totalement affranchi de ces tics. Taquin, Chris Martin guide les fans (à défaut du reste) dans quelques voyages « musique du monde ». Les cordes sur Yes ou Viva La Vida (single matraqué jusqu’à plus soif) forcent la main et l’auditeur se laisse, bien malgré lui, prendre au jeu.
Un album qui se laisse écouter en mode automatique, sans sourciller, est-il foncièrement mauvais ?
Aucune surprise, ultra produit, peu de vibrations (Violet Hill, ultra balisé tire néanmoins son épingle du jeu), et pourtant comme à l’accoutumé, le groupe séduit une nouvelle fois. Crispant de voir comment un disque presque anodin puisse enrôler même les critiques les plus acerbes.

Noesis.

CORIACE TOUR : Le Splendid, Lille, le 07 Novembre 2007



Octobre 2007, Headcharger, album du mois. Ce soir, le groupe, confirme, live, tous les espoirs placés en lui. Leur set, court mais incisif défouraille le parterre. Un concert rock’n roll qui déstabilise pas mal les kids venus en masse pour Eths. Mais Seb prend plaisir et fait rapidement main mise sur Le Splendid. Every Tick Of The Clock impose d’ahurissants breaks qui en mettent plus d’un, à genoux. Sur scène, le groupe se dépense sans compter, oubliant les déconvenues mollassonnes des jours passés, « près de chez Mickey »… Le public porte la formation, l’assaut est coriace…

« Hellcome home ! » Watcha jouera la quasi-totalité de son dernier opus. Le Bogeyman torture les esprits dans une furie de tous les instants. Inside fait des ravages au-dedans. Circle pit et braveheart –RIP Pleymo- plongent la foule en état d’apoplexie. Une pompe se retrouvera même sur scène, tant le choc fut violent… « Quel putain d’accueil ! » hurle alors Butch, avant d’introduire un Sam, plus énervé et déséquilibré que jamais. Uniquement deux anciens titres s’imbriquent dans le nouveau show : Concrete Lie et Cupide. Déception impossible, tant les nouvelles compositions passent haut la main l’épreuve du live ! Une sévère déculottée.

Non, Candice, elle, ne se déculottera pas ! Etonnant de voir que Eths doive encore subir ces remarques sexistes… C’est sur un sample criard à l’ambiance glaciale que le groupe nous souhaite la malvenue. Samantha et Crucifère sont vite expédiées, réduites à un medley d’ouverture. Ca, c’est fait ! Place aux compositions plus ambitieuses de Teratologie. Bulimiarexia place la barre très haute, et la voix très bas, au plus profond. Toujours juste, le chant s’aventure avec aisance dans des murmures inquiétants, des grondements gutturaux. En fosse, c’est la guerre. Baignés dans des nappes de lumières verdâtres, les fans participent activement à cette communion fétide. V.I.T.R.I.O.L met bien trop vite terme au concert le plus étonnant de cette soirée. Candice est au sol, hurlante, implorante, la cheville foulée. « Tes fins doigts dans la bouche, ces spasmes qui te soufflent… Je vois que tu souffres…Essaie de survivre… » (Bulimiarexia)

Noesis.

CRADLE OF FILTH : Eleven Burial Masses



Il est des jours où l’on se demande si certains groupes n’abusent pas leurs fans. Dani et sa bande de déglingués nous livrent une nouvelle mouture live. Mais attention, le groupe est aussi fourbe que le démon. En gros, ils ressortent un DVD vieux d’il y a six ans ( Heavy Left Handed ) et y ajoutent la captation CD dudit concert. Audio qui circulait déjà en bootleg depuis belle lurette. Bof. Il n’y a que l’artwork, comme toujours très soigné, qui sauve peut être le coffret du naufrage. Musicalement, cela reste du Cradle. Rien de révolutionnaire donc, mais un vrai plaisir auditif pour qui aime le black metal grand guignol. Le groupe ratisse large et délivre quelques musiques extrême-ment drôles. Ou inspirées, c’est selon.
Le DVD qualité VHS pourrait en faire rire plus d’un, mais l’entreprise est sérieuse. Visuellement, le spectacle est assez pauvre. La scène est immensément petite, les lumières peinent à installer une atmosphère que l’on souhaiterait plus angoissante. Heureusement, le son bombe le torse et reste correct. Incroyable pour un live du groupe, réputé pour ces shows inaudibles. De titres comme Her Ghost in the Fog (de l’excellent Midian) ou From The Cradle To Enslave, on retiendra surtout l’énergie en demie teinte du leader. Tour à tour concerné ou totalement absent. Les temps anciens bénis des diables ont passés l’arme à gauche. Le Cradle de Dusk and her Embrace a succombé à la facilité. Ce double live suinte la descente aux enfers. Espérons que le Malin, dans ses sombres desseins, tendra encore ses griffes au groupe, afin de conjurer au plus vite cet affront.

Noesis.

DA SILVA, Le Splendid, Lille, le 13 Novembre 2007.



« Mais nom de Dieu, comme c’était beau… »
Emmanuel Da Silva enchante, une nouvelle fois, le Splendid de Lille. Humilité et générosité du propos, il colore encore davantage une soirée heureuse. En première partie, Ocean, seule à la guitare nous raconte quelques bribes de vie. Le public, embarqué dans son petit monde patraque, lui réserve un bien bel accueil.
Manu fait monter l’ambiance, crescendo. La route défile au gré des titres. La salle succombe bien vite. Aérien, le set est une communion de chaque instant. L’attitude des altitudes porte le public vers des sommets d’émotions. Terriblement attachant, le chanteur n’a « aucune tendance à la frime ». Sa simplicité est touchante. Il salue et remercie le public entre chaque morceau.
La Saison reste un monument en live. Le titre est une redécouverte permanente. Ce soir, la relecture rock estomaque un public conquis. Quel plaisir de voguer au gré des cordes de Raphaël Chevalier : à l’écoute, discret, et pourtant tellement présent. Son violon porte le concert et sublime les assauts de guitare sur La Muraille.
Fuite permanente vers un ailleurs, le set s’aménage des instants célestes (La Fuite), d’autres de franche complicité (Les Fêtes Foraines).
L’indécision, tiraille une guitare torturée qui a du mal à trouver son final. La flamme ne faiblit pas, et Manu nous convie à Un après midi à la plage… « Rien à dire », toujours cette grâce dans l’interprétation. L’expression du sentiment est toujours juste. Aucune place à l’esbroufe.
En rappel, l’espace s’emplit de cris déchirants pour Le Retour Du Rose. « Les promesses »sont bel et bien tenues. Da Silva vient de livrer une prestation à fleur de peau. Marquante.

Noesis.

DA SILVA : de beaux jours à venir



Une vérité qui démange.

Da Silva avait enchanté le Splendid de Lille, lors de la dernière cuvée Europe 2 Live. Les histoires douces amères de l’homme avaient touché et rencontré le cœur du public. Le single entêtant L’indécision ne lâchait pas prise, l’univers De décembre en été collait à la peau. De beaux jours à venir étaient alors promis à Manu.

Le nouvel opus s’ouvre sur un après midi à la plage, souvenirs brumeux, parfois douloureux. Le violon de Raphaël Chevalier fait une nouvelle fois des merveilles, des envolées qui ramènent aux doux souvenirs du premier album. L’émotion est à fleur de peau. Le ukulélé ou le mélodica appellent bien malgré nous un parfum d’enfance. Tel un petit prince, Da Silva nous dessine un monde d’adultes sérieux et bruyant qui n’épargne pas.
Les amours difficiles y sont narrés, sans indécence. Les blessures de l’âme et de l’homme sont celles de tout à chacun.

La voix murmure, l’auditeur s’abandonne et s’évade avec elle. La fuite, trésor d’introspection finit d’asseoir une intimité criante. L’ivresse des passions est palpable, l’insouciance aussi. Les afflictions résonnent dans une production faîte maison, où le souffle cède le pas aux grincements des guitares. De menus défauts qui font le charme d’un album imparfait, terriblement attachant.

Noesis.

DAISYBOX : Polyester.



Sexy à souhait, Daisybox courtise son auditeur avec délicatesse. Séduisant, le groupe aborde la victime avec le brillant Polyester, premier single en rotation. L’entrée en matière est affriolante, la pop est sucrée salée, excessive et sensuelle. Les formes se dévoilent davantage avec une Dentelle de luxe. La langue française encore à l’honneur sur l’album, se ballade sur des mélodies lascives. Invitation à l’hédonisme, la voix d’Olivier fait souvent des merveilles et remplacera sans peine le plus pénétrant des sex toys. Difficile de se défaire de compositions mordantes telle que Satin. Le tissu glisse comme « un glaçon » fond sur le sein, et l’auditeur objet en redemande. Le châtiment est exquis et monte en intensité sur A part ça. Le plaisir de retrouver nos vieux amants d’Organic* n’est pas à bouder. Daisybox n’est toujours pas mort. Débordant de fraîcheur et d’énergie, Polyester s’introduit tel un Virus et attaque le cœur.
« Dis moi comment tu peux faire ça ? »

* Premier album du groupe.

Noesis.

DAVID VINCENT ET SES MUTANTS: Tu t’es vu quand tu mutes ?!



Un double album pour une double ration de bonne humeur. David Vincent –ex amis d’ta femme-, caustique et drôle sait aussi se la jouer sérieux sur des textes touchants ( Les bigottes et le clodo). Après les belles chansons, d’autres un peu plus nazes comme se plaît à le préciser l’artiste. Réjouissant, parfois à la limite de la chanson à boire franchouillarde (Marée Basse), ce live se déguste entre vieux potes. Ne se prenant jamais au sérieux, se vautrant même parfois dans l’interprétation, la jolie petite bande Swing-Punk apporte un véritable vent de fraîcheur ancré à gauche. Pustule l’ardéchois s’invitera même à la chasse aux cons. Car la bête est parfois difficile à débusquer. Tapi dans l’obscurité des couloirs du MEDEF, le con bat des records. Tu t’es vu quand tu mutes, ovni alternatif et libertaire au vitriol, nous l’atteste une nouvelle fois : la vérité est bien ailleurs. Peut-être sur scène ? On ne sait pas si David Vincent les a vus, mais nous, on attend de le croiser avec impatience sur les routes!

Noesis.

DEMAGO : L’hôpital



Bienvenue dans notre maison de santé.
Demago met l’humain à nu, et opère à cœur ouvert. Le scalpel est tranchant, les textes incisifs. L’hôpital accueille tous les maux de notre société. Les patients s’agglutinent, et errent dans les couloirs, à la recherche de réponses. Mais l’établissement écorche les plaies, plus qu’il ne les soigne. Les noirs désirs de l’auditeur remontent à la surface dans un fracas de guitare. Le traitement est des plus violents, les analyses du Professeur Maün sont sans concession : « Le patient est maniaco dépressif » (Hey Doc).
D’autres médications à base de slam, ou de nouvelles médecines parallèles usant de l’humour (Le Mégalo), sont préconisées pour faire passer la pilule. Plus difficile à avaler néanmoins, est celle de la chanson d’amour (100 000 mots), un peu trop sirupeuse. Bizarrement, le malade ne réagit plus et semble tomber dans un profond coma. Heureusement les électro chocs du phrasé assassin de Mes Mains le réaniment.
A présent, Respirez, on trouvera bien –ou pas- qui doit payer votre admission dans nos services avant l’asphyxie.

Noesis.

DIONYSOS : la mécanique du cœur.



Une vieille horloge, un vieux coucou déglingué. L’univers patraque se met en branle. Difficile de ne pas penser à Tim Burton et Danny Elfman. Voila qui est dit, nous n’y reviendrons plus.
La mécanique du cœur est bien huilée. Les personnages prennent vie et viennent hanter nos rêves les plus fous. Imaginez le casting : Olivia Ruiz, Jean Rochefort, Grand Corps Malade, Alain Bashung, Arthur H, etc. Ces fortes personnalités dévorent et marquent de leurs ombres cette œuvre atypique. Le long métrage s’anime en cinémascope noir et blanc ou sépia. Place au rêve et à l’imagination reine.
Le jeune Giant Jack naît en l’année 1874, le jour le plus froid du monde. Si glacé que son cœur en reste gelé. Madeleine, la sorcière, remplace alors le défectueux organe par une horloge. Tic Tac Tic Tac.
Tel un métronome, ce nouvel album de Dionysos n’échappe pas à l’incessante même mécanique. Les effets, gimmicks ou autres clins d’oeils (Ennio Morricone en tête) ne sont malheureusement pas que soulignés. Jack et son nouvel appendice au ventre ne peuvent supporter les émotions fortes. L’auditeur, lui, aurait aimé en ressentir davantage. Formidable sur le papier, le concept s’essouffle sur la partition et l’ennui pointe parfois.
Pourtant des titres marquent. Le Jour Le Plus Froid Du Monde, avec Emilie Loizeau intrigue, angoisse même. Difficile d’embrayer après pareille ouverture. Le brassage des styles (hip hop, rock, slam) n’est pas toujours heureux, même s’il est au service d’une histoire fascinante. Olivia Ruiz tire bien entendu son épingle du jeu, et sa douce voix s’accorde à merveille avec Mathias Malzieu, l’élu de son cœur.
Gageons que ce nouvel opus à ambiances délivrera, sans nul doute, toute sa charge émotionnelle sur scène, et on l’espère autant que le leader de Dinoysos, sur pellicule 35mm. En l’état, on préfèrera se tourner vers l’univers semblable, et davantage maîtrisé de Googooblown, le bonhomme.

Noesis.

DIVINE HERESY: Bleed The Fifth



Un artwork sobre et froid qui tranche avec des compositions éclatées et sulfureuses. Dix titres qui sentent bon le bitume. Bleed The Fifth est de ces albums qui en ont sous le capot. Le bolide file à plein régime sur des routes balisées. Territoire ennemi connu pour les aficionados : Dino Cazares (ex Fear Factory) assure les parties de basse et de guitare. Tommy Vent, « petit » nouveau, interpelle par la qualité de son chant. Aussi à l’aise en voix claire que gutturale, il est le véritable moteur du groupe. La batterie assurée par Tim Yeung (Hate Eternal) n’est pas en reste. Elle ferait presque plier la tôle, tant les doubles pédales secouent ce monstre de puissance. L’auditeur se sent pris aux pièges de cette mécanique ultra huilée. Les accalmies et autres incursions aériennes sont autant d’aires de repos aménagées sur une route à grande vitesse. Les audacieux et angoissants breaks de This Threat Is Real scieront les jambes des pilotes les plus aguerris.
A contre sens d’une production metal qui cherche à en mettre plein les yeux, DIVINE HERESY va à l’essentiel. Maîtrise et savoir faire. Un album qui véhicule une force de frappe redoutable, promis à de jolies embardées de platanes.

Noesis.

DRY CAN :something like that…



Something like Pearl Jam or something like Soundgarden.
Dry Can a d’illustres prédécesseurs. Difficile d’exister sans souffrir de la comparaison. Pourtant, dès les premières notes de Wherever I Stand, l’univers est en place. Dense et formidablement attractif. Le duo de voix emporte l’auditeur dans des territoires musicaux qu’il avait cru bon d’enterrer. La scène de Seattle des années 90. L’intitulé fait encore rêver. On se fait plaisir sur huit titres, on se dit qu’on a vieillit, mais que cette musique est fichtrement intemporelle.
Dry Can réussit le tour de force de la remettre au goût du jour en y insufflant une bonne dose de rock progressif, et même parfois d’une improbable fusion qui s’imbrique sans sourciller. Imaginez un peu une structure alambiquée façon TOOL avec des gimmick sauce Red Hot. L’idée à de quoi séduire.
Originalité donc. Mais également audace. Des titres tels que Leader ou Wild surprennent. Les hurlements d'Antoine Abinun ne sont pas sans rappeler les éclats de voix de Bert McCracken (The Used). Anne Bebann n’est pas en reste et élève le titre Ring au rang de pièce maîtresse.

L’album semble hanté par le spectre des plus grands. Mais les multiples influences sont digérées et recrachées avec une insolente nonchalance. Les riffs sont accrocheurs, les parties de chant mettent à genoux… (Leader, encore pour ces hallucinantes accélérations : Chino Moreno sort de ce corps !) La fougue s’éclipse tantôt pour des accords plus doux (October 19th et Unreal) qui ne font pas retomber la tension. Au contraire, ils tirent encore davantage sur la corde raide. L’émotion est toujours en ligne de mire.
Something like that, something like what ?
Et puis après tout, pourquoi ne pas le renommer cet album ?
There’s Nothing like Dry Can !

Noesis.

DUMAS : Fixer le temps.



Il aura fallu plus d’un an pour que ce nouvel album de DUMAS arrive en France. Fixer le temps, sorti en Novembre 2006 au Québec débarque timidement en France.
Enregistré live en analogique, l’opus surprend par la chaleur du son. Nulle place à l’esbroufe, les titres trouvent leur essence dans la pop anglo-saxonne. L’auditeur à la dérive, s’habitue bien vite à des ambiances cotonneuses (Fixer le ciel, forcément aérien) que viennent évaporer des compositions plus péchues (Au gré des saisons).
Jamais agressive, la pop rock de l’artiste séduit par son côté sans filet, proche du live. Douze titres qui embarquent dans de délicieux rêves. Sur tes lèvres ressuscitent les douces mélodies des Beatles. Les lignes de guitare rappellent même parfois un certain The Edge (U2).
Poste restante et son final enlevé transporte. Difficile de s’arracher à l’univers dessiné, les voix s’assemblent et se conjuguent. La nébuleuse, cet objet céleste sur lequel nous fait errer Dumas, a le sens de la mélodie. Des poussières d’étoiles. Imparable.

Noesis.

DURAN DURAN : Red Carpet Massacre



Difficile d’imaginer que Duran Duran, référence new wave, se laisserait séduire par le grand manitou pop Timbaland… Le producteur à la mode semble faire table rase du glorieux passé des anglais et impose la toute puissance de ses beats. Il y a de quoi crier au scandale.
Pourtant, le bougre réussit un nouveau tour de force. Rythmes enivrants, production chaude, l’album est une réussite, si tant est qu’on ose s’y aventurer avec une oreille avertie.

Oublié le rock, Red Carpet Massacre est clairement orienté dancefloor et l’on retrouve les incontournables sonorités électro de FutureSex/Lovesounds .L’homme au costard impeccable s’amuserait-il à remodeler toutes les belles poupées qui tombent sous ses doigts experts ? Après Justin Timberlake, Duran Duran fait exploser Timbaland (ou l’inverse). Omniprésente, sa voix transporte l’album vers de hautes sphères pop (Skin Divers ou Nite Runner feat Justin Timberlake). Pourtant, Simon Le Bon chante bougrement bien. Mais ses intonations suaves n’y font rien, Timbaland hante cet opus et l’auditeur se délecte de ses interventions. Les meilleurs titres restent d’ailleurs ceux où il est le plus présent. Incroyablement dans son temps, peut être trop (l’avenir nous le dira), ce Red Carpet n’est pas le Massacre auquel on pouvait s’attendre. Etonnant, donc.

Noesis.

ELIOTT : Dans un monde ou dans l’autre.



N’est pas aussi sensible que le bon vieux dragon de Disney qui le veut.
Ici Eliott n’y va pas de main morte et grossit le trait. Dépressive à souhait, leur musique n’inspire qu’ennui et idées noires, comme une envie de jeter le CD par la fenêtre. Passer à autre chose.
Une voix qui insupporte en démonstration constante. Cela monte très haut, mais l’émotion ne suit pas. La faute à une section rythmique mille fois déjà entendue.
L’intro de L’indéfini sort toutefois du lot. Mais dès que le micro est branché, le chanteur retombe dans ses travers. Les murmures, les affections de la voix, ses inflexions criardes ne sont pas du meilleur effet.
Alors mince, il y a bien quelques mélodies sympathiques –Minuit-. Mais rien n’y fait. L’auditeur n’est pas emmené dans cet univers sombre à peine effleuré par un groupe qui semble encore chercher sa voie.
Tout reste très hermétique, comme si Eliott ne jouait que pour eux. Dans ce monde ou dans l’autre ? On préfèrera les croiser dans un autre. A n’en point douter.

Noesis.

EMPYR : The peaceful Riot



Pleymo n’est pas mort, Kyo respire encore.
Projet bancal pour certains. Condamné avant même d’avoir émis une seule note, le 1er Empyr contre attaque les médisants avec douze titres étincelants. Le single New Day risque de créer l’agitation. Aérien et obsédant, le morceau exhume le meilleur de Alphabet Prison (dernier Pleymo). Loin de n’être que simple copie, Empyr ose la mélodie qui fait mouche et la voix écorchée. Bert McCracken (The Used) trouve en Ben un concurrent sérieux dans l’expression des émotions. La montée en puissance de Forbidden Song ébranlera les plus endurcis. Toujours sur la corde raide, la tension est palpable sur tous les titres. Formule gagnante, même si elle repose sur une mécanique mille fois éprouvée. L’auditeur se laisse séduire, et le groupe pourrait bien devenir la nouvelle voix des âmes perdues (The Voice Of The Lost Souls).

Noesis.

L’ESPRIT DU CLAN



Une goutte de sueur perle encore sur le front, quand s’achève la dernière plage de ce monstrueux Corpus Delicti. L’esprit du clan signe là, le nouveau testament d’un metal français puissant qui marquera les esprits.
L’artwork violent et torturé secoue. Mais il n’est rien comparé aux onze plaies qui vont s’abattre sur l’auditeur. La section rythmique est de nouveau ultra puissante, et il faut avoir le cœur bien accroché pour ne pas défaillir. Le metal hardcore du groupe lorgne sans pudeur vers un trash complètement assumé aux soli ravageurs.
« Mesdames et messieurs », pose les fondements énervés d’une œuvre à la sincérité et aux émotions palpables.
Exaltation des sentiments aussi, où les douleurs et les espoirs sont en perpétuel conflit. L’album touche en plein cœur et la vitesse d’exécution couplée à une ahurissante technicité acquise ajoutent à la délectation.
« Délivrer un message de paix » sous une telle bastonnade auditive peut sembler antinomique. Finalement, le discours passe et l’on pourrait presque parler d’hymne à la vie.
Les voix déchirantes nous soutirent l’ivresse. Comme une envie de corps à corps brûlants dans des passages atmosphériques qui transcendent l’auditeur.
L’esprit du clan boucle avec ce CORPUS DELICTI un vibrant troisième chapitre de son histoire.

Noesis.

MASS HYSTERIA / EVANESCENCE. ZENITH LILLE. 30/05/07



Incompréhension.
Mass Hysteria ouvre pour Evanescence. Deux styles radicalement différents. Deux approches distinctes de la musique. Ce soir, les Mass réitère le tour de force d’un Bercy 2000 heureux. Après le public de KORN, c’est à celui d’ Amy Lee Evanescence de se faire atomiser sous la Furia.
Contraddiction lance le bal. Déjà, dans la fosse, les premiers frissons se font sentir. Les kids se laissent aller et quittent l’univers noir de leur groupe fétiche. Positif à bloc, Mouss se met la fosse en poche avec classe et culot. Le set est retravaillé, l’artillerie lourde est de sortie. Imparable.
Véritable phénomène de live, le groupe électrise le Zenith. Babylone et son break façon Gojira étonne et emballe les jeunes au rimmel dégoulinant. Une somme de détails aux allures de Zion presque palpable. Du bonheur en barre pour la jeunesse. Les quarante cinq minutes défilent trop vite, mais l’espoir fou de les revoir est permis. Fin 2007, Mass sera sur les planches du Splendid et inoculera une nouvelle dose de bien être et de paix.


L’enthousiasme retombe bien vite. Une musique grandiloquente fait trembler le rideau, derrière lequel Evanescence –ou ce qu’il en reste- se tient prêt. La porte vers un autre univers musical s’ouvre. (THE OPEN DOOR, dernier album en date) La chanteuse rescapée d’un groupe qui se perd, Amy, court vers les fidèles hystériques. Ses petits poings battent poliment la mesure. Montée sur piles usagées, c’est avec une énergie mollassonne qu’elle va assurer le minimum syndical. Une heure dix minutes sur une scène désespérément vide ou beaucoup trop grande pour elle. C’est dans la douleur qu’elle arrive par instant à emplir l’espace par son charisme relatif. Affublée d’un truc en plumes emprunté à Zizi Jeanmaire, ce petit bout de femme fait parfois peine à voir. Les notes les plus hautes ne sont que très rarement atteintes. Petite forme ?
Les musiciens intérimaires jouent bien. Dame Lee sourit, Dame Lee est triste. Tout est calibré, millimétré. Un concert sur mesure et l’addition, svp ! Pas de surprise. Ce live, c’est un peu le voyage de Marie Rose au pays des goths. Parfois, surnagent quelques beaux moments : Going Under, Tourniquet, Haunted, Cloud Nine ou Call Me When You’re Sober et son dynamisme certain. Rien de transcendant, cela dit. Juste au dessus du lot, mais bien meilleurs que les tunnels interminables de pathos au piano. Car Amy Lee, c’est un peu le Charly formidable Oleg du metal sans le sourire. Du coup, on rigole moins, et on patiente que tourne le manège de ses sentiments contradictoires. « We have a lot of fun tonight » nous lance t’elle, souriante, avant de se lancer dans une comptine écrite sous la potence. Un peu de logique et de folie dans la mise en scène feraient elles défaut à ce spectacle pour adolescents?
Car oui, dans les yeux du jeune public, ce live devait être très bon. Amy est mignonne, elle chante trop bien. Ses fringues, mortels… D’autres considérations tout de même : le plaisir de voir son idole, une bonne ambiance, un son jamais agressif, l’alcool qui coule à flot, l’émancipation, le premier concert sans les parents… Etrangement, le spectacle est davantage en salle que sur scène. Presque touché de voir cette jeunesse unie, souriante –ou pas-, ailleurs qu’autour de slogans fédérateurs nazillards. Juste pour cela : merci Evanescence. Pour le reste, trop vieux s’abstenir.

Noesis.

LES FATALS PICARDS. 06 Avril 2007. Hénin Beaumont.



Voir Les Fatals Picards en concert, c’est un peu faire fi de toutes les conventions scéniques. C’est aussi se dire qu’on va passer une soirée de franche rigolade. Parce que les fatals y sont rigolos. Mais comme tous les bons clowns, les amuseurs cachent toujours un pathos déchirant. Les textes pour de rire sont toujours ancrés dans une réalité déprimante. Aussi, les voir sur une scène du Pas de Calais, terre de gauche grisonnante, cela promet un clash détonnant. Henin Beaumont et son patapouf de vigile m’accueillent sans les honneurs. Suite à une discussion musclée et des répliques méchantes pour du beurre, L’Escapade ouvre ses portes. Une petite salle chaleureuse qui promet un live surchauffé. Ce soir, les Fatals jouent à guichet fermé. Le public révise ses classiques dans la file d’attente. Chasse pêche et biture résonne dans tous les coins de la rue. On fait dans le discret par chez nous.
En première partie, Les Kanards Lakés tentent de chauffer les gens avec des répliques pas amusantes et des accessoires cocasses. Le pistolet à eau, tout de même, quelle bonne poilade pour la petite Justine, quatre ans. Le reste des copains esquissent quelques sourires gênés.

Enfin, les méga stars déboulent. Show à l’américaine, prises de positions musclées, lasers à tout va, du charisme et du talent. Les Fatals, c’est tout ça à la fois, avec du plus en plus. Dès les premières notes, la fosse est en liesse. De toutes façons, tout le monde est debout. Y’a pas de sièges à Henin. Le PC n’a plus d’électeurs, alors des sous… Pensez-vous !
Bref, pas de politique en musique. Quoique Les Fatals y sont sympas, y sont de gauche. Vallait mieux en venant à Henin, ceux de droite on leur fait manger des kebabs pas frais avant de les lyncher sur la place publique avec le vigile. Et il est costo, Haribo.

Les titres s’enchaînent et l’ambiance monte crescendo –mot compte triple-. Le dernier album PAMPLEMOUSSE MECANIQUE prend une toute autre dimension en Live. Moi je vis chez Amélie troue le canal St Martin. Djembé Man appelle au meurtre de ces terroristes. La Française des jeux est toujours aussi tristement réjouissante. Les pogos sont légion pas étrangère et ça saute de partout. Les titres plus anciens ajoutent au bordel ambiant, Goldorak est mort fulguropoigne ceux qui en ont encore sous le pied ou dans le slip. Mais rien ne laissait présager de la secousse sismique lors du lancement de Chasse, pêche et biture.
Hénin peut être fière, elle a une sacrée bande de jeunes qui savent mettre l’ambiance avant de retourner au tuning store.
On est comme ça chez nous. Entiers. On se donne sans compter. Les Fatals aussi. On a hâte de les recroiser sur les routes. Mais faîtes gaffe, ils ne laissent jamais la priorité à droite.

Noesis.

Gogol Bordello: super taranta!



Gogol Bordello. Avec un nom pareil, on pouvait s’attendre au pire. L’artwork n’aidait pas non plus l’auditeur potentiel à se lancer tête baissée dans le joyeux bordel de ce groupe ravagé du bulbe.
Et pourtant ! Grave erreur que celle de ne pas s’attarder sur ce Super Taranta déjà culte. De mémoire, jamais autant de cultures musicales n’avaient été mélangées avec autant de brio. Le vieux folk irlandais côtoie la lointaine Pologne. Bande originale improbable d’un film d’Emir Kusturica, l’accordéon cède bien vite la place à des rythmes syncopés. Souvent proches du festif Come On Eileen (Dexys Midnight Runners), les Gogol Bordello vont vous retourner les sens et le dance floor va s’écrouler sous les coups de butoir des violons gypsys.
Melting-pot couillu et maîtrisé de bout en bout, leur fusion est une invitation au brassage des cultures. Une connexion tribale (Tribal Connection) qui ose le décalage atypique dans un paysage musical morose.
Savant mélange entre Manu Chao et System of a Down comme l’indique la bio, véritable vent de folie et de fraîcheur, Super Taranta est la grosse surprise du moment. Suddendly ose même une accroche disco funk sur les premières attaques de guitare avant que des violons ne se fassent malmenés par une approche beaucoup plus metal du morceau. Alcohol calme la furie expérimentale. Le whisky s’inocule dans les veines, le mal de mer est plapable.
Alors quoi ? Un album qui donne le tourni à déguster autour d’une bonne pinte ?
Oui, mais pas que.

Noesis.

GOOGOOBLOWN.



Perrault & Cie


« Fiston, va voir comme se porte ta mère-grand, car on m’a dit qu’elle était malade. »
Le Petit Homme partit aussitôt pour aller chez mamie, qui demeurait dans un autre village.
En passant dans un bois il rencontra compère le Loup, qui eut bien envie de le manger ; mais il n’osa pas, la faute à quelques sombres accords de musique qui le stoppèrent dans son élan.
Au loin, il cria :
« Mais qu’est ce donc que ces cordes qui retentissent dessous ton casque ? Quelle est donc cette magie noire qui me rend tout chose ? ».
« Ca, c’est Googooblown, une œuvre complexe dont les animaux de ton genre ne peuvent saisir toute l’intensité. », lui répondit hardiment le jeune bipède.
« Que nenni » rétorqua maître loup qui tapaient de la patte à l’écoute de ces drôles de sons entrelacés. « Fin mélomane, je sais reconnaître la grande musique, mes longues oreilles aidant ! »
Et le canidé avait bien raison. Ce Devilish Fantaziah qu’écoutait le chérubin était de ces créations qui interpellent. Bien plus que de la Pop Rock, le groupe délivre une poésie sombre et torturée. Grandiloquent, leur style en impose.
Rusé, notre acolyte aux dents aiguisées, tendit la patte.
« Sers m’en une. Je ne te croquerai pas. »
Le garçonnet ne se méfia pas. Tout encore absorbé par cet univers tordu, que même Danny Elfman –un drôle de compositeur- ne renierait pas.
Grave bêtise. Le loup, déjà accro serra les crocs, autour du baladeur du pauvre enfant, et prit la poudre d’escampette, Devilish Fantaziah, au creux des dents.
« Reviens ici, vilain animal » hurla le marmot ballot. Mais il était trop tard, l’insolent coquin était déjà bien loin. Dans une forêt presque aussi sombre que le petit théâtre des horreurs de Googooblown.
Depuis ce jour, il n’est pas rare, la nuit tombée, de voir les arbres s’agiter, autour d’un loup habité, valsant avec le diable au clair de lune.
Moralité.
Gardez cet album bien près de vous.
Les copains vont le voler.
A n’en point douter.


Librement adapté du conte de Charles Perrault, Le Petit Chaperon Rouge.

Noesis.

GRAND CORPS MALADE, SEBASTOPOL, 20 Octobre 2008.



« A Lille, y’a pas la crise. » Comte de Bouderbala, Octobre 2008.
Décidemment très drôle, Sami, artiste de stand up, assure une première partie détonante et s’attire les faveurs d’un public conquis avant que Grand Corps Malade ne monte sur scène.

« Et le silence s’estompe quand la percu démarre ». Une longue intro musicale n’est « que le début de l’histoire ». Fabien revient sur ses premières soirées slam dans les bars sur J’écris à l’oral. Le chemin parcouru est vertigineux. Le Sébastopol est ce soir le théâtre d’échanges savoureux. Le collectif Lillois On A Slamé Sur La Lune répond à l’invitation de Grand Corps Malade et tisse quelques textes encore hésitants devant le ténor de la rime. La communication entre l’artiste et les spectateurs est authentique. De nouveaux univers sont explorés sur chaque titre et l’on passe d’un appartement crasseux de célibataire aux mélancoliques et lumineuses Quatre Saisons. Difficile de ne pas se sentir concerné par tous ces beaux voyages. Humour, émotion, le verbe se conjugue avec brio. Le cœur bat au rythme de la rime. Une farandole de sentiments qui s’étire deux heures durant. Album photos de notre monde, le concert de ce soir gifle l’esprit. Ici, deux amoureux s’embrassent sur Les Voyages En Train. Là, un gaillard chambre gentiment l’enfant de la ville.
Du côté chance en rappel, pose un joli bilan devant une assistance debout, pleine d’affection. Nul doute qu’en Live avec Grand Corps, ça peut chémar.

Noesis.

GRYMT



Richter, force 4.

Une cinglante dérouillée, une tempête sismique qui délabre le salon, le Dark One de Grymt, c’est un peu Richter qui s’invite sur la platine.
Les dix titres façon grind secouent l’auditeur, sans jamais le balader en territoire inconnu. Pas de grosse prise de risque, si ce n’est le fait de mettre Etienne Sarthou–Aqme- derrière les fûts. Sacrilège pour les fondus du bulot genre. Compositions, prod, artwork, thèmes abordés, restent dans les classiques lignes du grind. Rien de véritablement neuf sous le soleil de Satan donc, mais l’ensemble est suffisamment intense pour que l’on se remesure à la bête après plusieurs écoutes.
La voix n’est pas qu’ultra violence. Elle sait varier les déplaisirs, tout comme la structure des morceaux, pas forcément plombés dans le même schéma brutal.
Les 27 minutes bien tassées en laisseront plus d’un sur le carreau, des érudits pas contents jusqu’aux novices conquis. Mais ce serait péché que de ne pas se laisser aller au defecate and fuck avec Grymt. Satisfaction des sens à l’appui.

Noesis.

GUERILLA POUBELLE, LES VILAINS CLOWNS, LEPTIK FICUS, BLURP ! , RADIO BISTROT En Concert Et Rock’n’Roll Circus Show



Doit-on tout pardonner au mouvement punk ? Sous prétexte d’une révolte contre un ordre établi, est-il normal de délivrer au public un matériel aussi crapuleux ? Skalopard’s Prod’z a la réponse : oui, tant que cela se vend !
Comment s’attarder sur pareille escroquerie sans user du verbe fort ? Deux DVDs, deux CDs au son indigeste qui sature à tout va. Rien ne se dégage de ces brouillons de travail. En prise directe, la captation est exécrable. Pire, les enceintes ne crachent qu’un vrombissement assourdissant. Les couleurs bavent, les menus sont illisibles (quand ils ne buggent pas), et la folle ambiance du live fait peine à voir. Malgré l’avertissement sur le peu de moyens octroyés à la réalisation de pareil fourbi, on ne peut que s’étonner face à l’effroyable résultat. Aucun des groupes présents ne s’en sort avec les honneurs. Entre authenticité et imposture, la limite est parfois palpable. A fuir comme une bouteille de Jack avariée.

Noesis.

HERMAN DUNE. Splendid. Lille. Le 17/10/07.



« and your love is like a diamond… »
FLP rappelle Herman Düne à nos bons souvenirs. Giant, dernier album en date est sorti il y a un an. Pourtant le plaisir de l’écoute reste intact. Ce soir, Le Splendid va assister à une performance unique, un voyage musical intemporel. Bien loin des clichés du concert habituel, le groupe délivre un set où le partage est de tous les instants. Son anti folk se ballade au gré des envies, pas de réelle set list. Ambiance décontractée où la générosité semble être le maître mot. Les titres s’enchaînent, s’étirent pour de véritables émotions. Percussions et cuivres donnent le tournis. Good for Noone plonge l’assistance dans le tourment, le travail sur le son est exemplaire, la batterie se fait lourde, angoissante.
I wish I could see you soon se balance sur une douce vague qui emporte tout. Porté par un flot ininterrompu de voix envoûtantes et de musiques enchanteresses, le public se laisse séduire. Le son cristallin participe à cette belle communion. Les deux frères délivrent là une performance toute en douceur, cotonneuse. Les yeux sont clos, la foule se meut dans une intimité déconcertante. Take me back to New York City se promène en tête bien après que les lumières se rallument. Le public se sent pousser des ailes. Délicieuse chaleur vaporeuse. Tous les sens sont aux abois. David jappera même un titre durant pour un petit bonhomme de six ans, qui le rejoindra sur scène. Sourires de connivence, Splendide grande famille réunie dans cette salle. Tous se reconnaissent dans cette musique chaleureuse.
Rarement, ivresse n’a été si agréable.

Noesis.

HUMA 2007 (deuxième partie)



Deuxième jour. Le soleil brille davantage, la programmation est affolante. Le camping se réveille difficilement, des cadavres de bouteilles jonchent le sol, d’autres dépouilles plus humaines balbutient quelques grognements. Qu’importe les odeurs insurmontables qui envahissent les lieux communs… Le coin presse, c’est tout de même une bien belle invention !
Les accès au site sont aujourd’hui saturés. Impossible de circuler normalement. Les alentours de La Courneuve sont bloqués. La rançon du succès. (De la gauche ?) On aurait aimé vous mettre KO avec un live report de Mademoiselle K, mais les forces de l’ordre ne voulaient rien entendre. Pas de facilité d’accès au site. On repassera pour les passes droits de la presse ! Mince alors.
Origines contrôlées mettent les lèves tôt (16 heures tout de même…) à genoux. Un concert d’une efficacité redoutable. Le public danse et porte le groupe dans une communion de chaque instant. Adieu la France, bonjour l’Algérie. Quel plaisir de voir cette musique s’élever devant un public aussi réceptif. Idir, une référence et réelle inspiration, montera sur scène sous une salve d’applaudissement. Belle image d’un pays uni.

Luke ne calme pas l’assistance. Les premiers rangs se souviendront longtemps de ce set incisif. La fosse se meut –meuh- sous un nuage de poussière qui donne au site une atmosphère de bataille rangée. Hasta Siempre ouvre les hostilités. Jamais la tension ne faiblira. La puissance de frappe du groupe impressionne. La sécurité aura fort à faire, les évanouissements se multiplient. Les pogos font rage. Des lances à eau sont mises à contribution pour rafraîchir une fosse compacte. Les titres du nouvel album (Les enfants de Saturne) passent haut la main l’épreuve du live. Soledad ajoute encore à la folie ambiante : « allez crie, juste pour voir », hurle Thomas. La Sentinelle fait mordre la poussière aux plus courageux. L’air devient vite irrespirable. Le titre revisité s’aménage des espaces de liberté pour mieux surprendre lors de sournoises accélérations de rythme. Les forts à propos Paradis Rouges mettent un terme à ce premier concert de Luke sur La Grande Scène de l’Huma. Gageons que cela ne sera pas le dernier.

Ayo, vient apaiser les esprits et déposer quelques nappes doucereuses avant le choc Razorlight. Le temps de redécouvrir les multiples attractions que propose le site : expositions, débats, théâtre… Quelques manèges à sensations accueillent même les courageux qui veulent rendre leur kebab ou leur plateau de fruits de mer… Tout dépend des finances.

Difficile de traverser les allées pour rejoindre La Grande Scène. Razorlight et Iggy Pop font le plein ce soir. Une marée humaine salue l’arrivée des britanniques. Rien comparé à l’ovation réservée à Johnny Borrell, le chanteur. Toujours aussi charismatique, il lance In the Morning avec rage. Le public rejoue Waterloo dans la fosse. De nouveau les Anglais nous en mettent plein la vue. Mais le phénomène à observer reste ce petit diable aux yeux bleus qui charment son public comme personne. Toutes les techniques sont bonnes pour envoûter, même les plus roublardes. Susurrer en français le classique Je suis venu te dire que je m’en vais n’est pas une méthode, monsieur ! Croiser le regard du malin dans de telles conditions, c’est succomber à ses attraits. Véritable transe chamanique, ce set de Razorlight restera dans les mémoires. Somewhere else, son clavier enivrant et sa batterie galopante est une véritable fuite vers un ailleurs.

Ailleurs, où le célèbre « sex, drugs and rock’n roll » prend tout son sens. Philippe Manœuvre en personne, introduit le groupe à suivre. Iggy Pop and the –« fuckin’ »- Stooges s’apprêtent à renverser la fosse. Le concert retransmis en direct sur France Inter est une tuerie de tous les instants. Impossible de retranscrire les réactions des fans, estomaqués. Iggy, la légende, torse nu, est heureux sur les planches, s’amuse avec les photographes, dévaste la scène, et descend auprès des fidèles. Une heure et quelque de réelle sincérité, d’abandon véritable. Un pur moment de plaisir partagé. Loose ouvre le show dans une atmosphère électrique, le public en panique ne contrôle déjà plus rien. Les mouvements de foule feraient presque peur. La sécurité est dépassée. De toutes parts, les corps tombent ; les cris font peine à entendre, d’autres malheureux vomissent avant d’être évacués. La guerre se joue derrière les photographes. Dès le quatrième morceau (TV Eye), Iggy descend en fosse alors que les journalistes ne sont pas encore sortis. La bataille est rude. Sueur et combat aux corps. Dieu que le rock est bon !
Libérateur de toutes les folies, Iggy en veut plus : « Alright you motherfuckers ! ». Sur le grand écran, le conflit fait rage. Les images affolent, angoissent. Comment tout cela va-t-il finir ? Sur scène, l’incendie ne s’éteint pas. Real Cool Time est le moment que choisit le maître de cérémonie pour faire monter la température d’un cran. Les fans sont appelés à monter auprès de lui et à partager le micro. Diable, ce concert nous rendra tous fous ! Sourires et pleurs, joie et douleurs physiques se lisent sur les visages des premiers rangs. Les Stooges sont toujours aussi mal élevés et bruyants. Crade et sexy, Iggy baise avec les enceintes, se mouille le corps et fait le chien libidineux devant des jeunes filles peu farouches. I wanna be your dog est reprise pour la seconde fois avant de laisser La Courneuve trempée de désir. L’étreinte fut bestiale. Le retour à la maison sera long et difficile. Un peu de mal à s’asseoir après pareille union…

Noesis.

HUMA 2007 (Première partie)



D’un rassemblement des forces de gauche, La Fête de l’Humanité est devenue, bien malgré elle, un immense festival musical où les grosses pointures se succèdent à un rythme infernal. Cette année, Razorlight et Iggy Pop font le déplacement à La Courneuve, Luke et Les Fatals Picards font face aux rouleaux compresseurs. Les belles Olivia Ruiz et Ayo apportent une jolie touche sucrée, tandis que Johnny Clegg et Origines Contrôlées nous proposent un voyage haut en couleurs. Le soleil brille, les filles sont jolies, les spécialités culinaires régionales et mondiales ravissent les sens. Le séjour sera synonyme de plaisir.
Rarement le terme fête aura été honoré avec pareille ferveur. Trois jours à arpenter les allées d’un gigantesque site dans une ambiance bon enfant. Ci et là, des guinguettes improvisées et des dance floor endiablés. Toutes générations confondues, autour d’une idée de la gauche unie.
80000 personnes sont annoncées devant La Grande Scène. Vif succès. Faut pas baisser les bras, Johnny Clegg motive les troupes avec un titre qui mêle anglais, zoulou et français. L’enchaînement avec Scatterlings of Africa est un ravissement, sous une chaleur estivale. Les chaudes couleurs sur scène accompagnent cette musique du monde qui prône la tolérance. La bataille de danses zoulous et urbaines va dans ce sens. « Vive la France, Vive l’Afrique ! », un cri du cœur qui introduit le touchant Asimbonanga, qui s’écoute dans un quasi recueillement.

Grand Corps Malade séduit toujours autant. Les textes émeuvent ou font sourire. Son slam se ballade, insidieux, dans nos esprits, ouverts, réceptifs. Les rimes claquent, les thèmes frappent par leur diversité. Fabien raconte la vie, la fait vibrer. Le public est conquis par la sincérité du propos, la verve du verbe.
Au loin, sur la scène du Zebrock (comptez quinze minutes de marche !), Clarika enflamme un joli parterre d’accro à une musique un peu plus saturée. Son sens du spectacle fait mouche. Les anecdotes sur son idylle farfelue avec Robbie Williams (« He’s a good coup ») égaient un set carré qui ne peut faire l’impasse sur les vestiaires des garçons. Autodérision, danses improbables, communication efficace font de ce concert, une véritable surprise avant la déroute des Fatals Picards…
De mémoire de Picards, jamais ils n’avaient eu un son aussi lamentable. Les titres s’enchaînent dans une indifférence qui fait peine à voir. Difficile d’entrer dans leur réalité absurde, tant les paroles et instruments ne se distinguent guère. « On n’entend rien, on n’entend rien ! » protestent les Djembé Men et autres Amélie Poulain, qui font grise mine. La grosse déception.
Il valait mieux retourner sur La Grande Scène pour apprécier la classieuse et séduisante Olivia Ruiz qui mettait un terme à sa tournée de la femme chocolat, dans une ambiance surchauffée. De fait, le cacao se déguste avec délice. Christian Olivier des Têtes Raides croque la tablette avec envie sur le titre Non mais dis donc. Gourmands, les fans sont venus en masse, et se régalent devant ce spectacle maîtrisé de bout à bouche.
Il est déjà temps de prendre congés, la journée de huit heures est largement dépassée. François Hollande, présent sur les débats du lendemain, en appellerait à la grève pour moins que ça…

Noesis.